Comprendre la stratégie logement du gouvernement

Logement

Comprendre la stratégie logement du gouvernement

La mise en œuvre des promesses du candidat s’est traduite, dès son arrivée, par l’établissement d’un vaste plan Logement qui, au fil des mois, s’est étoffé. Ce plan inclut des mesures spécifiques (notamment sur les APL), des mesures de lois de finances et une loi.

Le logement est de loin le premier poste de consommation des ménages, près de 20%. Depuis des décennies, notre pays est en situation de crise du logement et les politiques publiques dans ce domaine se sont imposées comme un élément essentiel de la solidarité nationale : en 2016, elles représentent près de 41,7 milliards d’euros, soit 1,9% du PIB. Ces dernières années ont été marquées par un déchaînement normatif et bureaucratique en matière de logement. Et cela en utilisant une partie de l’épargne des Français, immobilisée pour financer des logements sociaux qui représentent 17% du parc de logements, c’est-à-dire plus de deux fois la moyenne au sein de l’Union européenne (8,6%). Entre 1985 et 2011, on observe une augmentation de 53% du parc social. Sur la même période, les bailleurs privés ont été peu à peu dégoûtés à cause d’une fiscalité exorbitante passée de 37 milliards d’euros en 2000 à 63 milliards en 2013.

  • Juillet 2017 : Consultation auprès des acteurs du logement, de la construction et de l’aménagement pour identifier les besoins et les propositions. La consultation a produit plus de 1.200 propositions. Elle a été clôturée le 10 septembre ;
  • 20 septembre 2017 : Présentation de la Stratégie logement. Celle-ci a été présentée par les « deux » ministres en charge du Logement, Jacques Mezard et Julien Denormandie, déclinée sous 3 piliers :

Pilier 1 : construire plus, mieux et moins cher, pour provoquer un « choc d’offre ».

  • Mise en place d’un abattement fiscal exceptionnel sur les plus-values pour la vente de terrains en zones tendues.

Actuellement, la fiscalité du foncier est contre-productive, puisqu’elle incite les propriétaires à conserver leurs terrains (la plus-value immobilière est exonérée d’impôt au bout de 22 ans de détention). Le nouveau dispositif inverse cette logique. Il vaudra pour les promesses de vente conclues avant 2020 en vue de la construction de logements. L’abattement sera de 100% pour les cessions destinées à la construction de logements sociaux, de 85% pour les logements intermédiaires et de 70% pour tous les autres logements.

  • Un engagement « zéro nouvelle norme technique dans la construction », mises à part celles qui touchent à la sécurité ;
  • Un meilleur encadrement des recours pour lutter contre ceux qui sont abusifs, notamment dans les zones tendues.

Pilier 2 : répondre aux besoins de chacun et protéger les plus fragiles.

  • Pour les locataires du parc privé, la création d’un bail mobilité spécifique de 1 à 10 mois non renouvelable et sans dépôt de garantie pour les personnes en formation professionnelle, en contrat d’apprentissage ou en stage. Pour simplifier les démarches des locataires et des propriétaires, un bail numérique sera également mis en place ;
  • Pour les locataires du parc social, un réexamen de la situation des ménages tous les 6 ans pour les nouveaux entrants, ce qui permettra d’optimiser l’occupation du parc en adaptant les offres aux besoins réels des ménages ;
  • Pour les acquérants, la prolongation du prêt à taux zéro et du dispositif Pinel, qui seront mieux ciblés vers les territoires qui connaissent de fortes tensions. Par ailleurs, la vente de logements HLM sera facilitée pour ses occupants grâce à la mise en place d’une structure dédiée, ce qui permettra de multiplier par 4 le nombre de logements vendus ;
  • Pour les jeunes et les étudiants, la construction de 80.000 logements sur le quinquennat ;
  • L’accélération de la production de logements sociaux et très sociaux (construction de 40.000 logements PLAI par an dès 2018 sur l’ensemble du quinquennat et 10.000 en pension de famille).

Pilier 3 : améliorer le cadre de vie.

  • Doubler le programme national de renouvellement urbain de 5 à 10 Mds € afin d’agir sur les 450 quartiers où la pauvreté est la plus forte ;
  • Accélérer la rénovation et la mise aux normes des logements dans les centres des villes moyennes par la mobilisation de moyens spécifiques de la Caisse des dépôts et consignations et d’Action logement.

Certaines mesures ne figuraient pas dans le programme, en particulier la mise en place d’un abattement fiscal exceptionnel sur les plus-values pour la vente de terrains en zones tendues. Pour le reste, c’est assez fidèle au programme avec une mise en œuvre qui repose sur le PLF 2018 et sur une Loi spécifique qui devait être alors présentée fin 2017 mais qui sera selon toute probabilité reportée à 2018 (présentation en conseil des ministres en fin d’année mais discussion au Parlement au début de l’année prochaine).

Quelle procédure pour le Plan logement ?

Pour mettre en place ce Plan logement, le gouvernement a choisi plusieurs voies :

  • Annoncée mi-juillet 2017 : La diminution de 5 euros des APL au 1eroctobre 2017 a été mise en œuvre par décret le 28 septembre 2017. Voir la fiche dédiée
  • Plusieurs mesures ont ensuite été mises en place dans le budget 2018 : recentrage Pinel, recentrage PTZ, nouveau programme ANRU, baisse supplémentaire et réforme des APL

Par ailleurs une convention a été signée avec Action Logement qui complète les mesures mises en œuvre dans le cadre du PLF. Protocole d’accord signé le 21 novembre 2017, il fixe les grands axes de la convention quinquennale 2018-2022 entre Action Logement et l’Etat qui serait définitivement conclue « avant fin 2017 » :

  • NPNRU : Le protocole prévoit qu’Action Logement contribue à hauteur de 2 milliards au NPNRU : L’Etat confirme qu’il participera à hauteur de 1 milliard. Avec les 5 milliards déjà actés, on arrive à 8. Pour pouvoir tenir la promesse d’Emmanuel Macron de doubler le financement du programme et de le porter à 10 milliards, les deux partenaires prévoient dans leur protocole que « les bailleurs sociaux contribueront également à hauteur de 2 milliards d’euros » ;
  • 2 milliards pour bonifier les prêts haut de bilan : Le protocole prévoit qu’Action Logement financera la bonification de 2 milliards d’euros de prêts haut de bilan qui seront proposés dès 2018 aux organismes de logement social ;
  • La création d’une structure de portage pour accompagner la vente HLM : Action Logement créera une structure « qui aura la charge d’acheter en bloc des immeubles aux bailleurs sociaux avant de conduire la vente à l’occupant ». La création de cette structure de portage se fera dans le cadre de la stratégie logement qui prévoit d’accélérer la vente de logements sociaux pour passer de 8.000 à 40.000 ventes annuelles par les organismes HLM soit 1% du parc social ;
  • 1,5 milliard d’euros pour la rénovation des centres des villes moyennes : Action Logement financera la revitalisation des centres-villes des villes moyennes à hauteur de 1,5 milliard d’euros sur 5 ans, par la construction, la réhabilitation ou la démolition de logements et d’immeubles ;
  • 500 millions pour la rénovation énergétique du parc privé : Action Logement contribuera à l’engagement du gouvernement de mettre fin aux « passoires thermiques » via son projet « Louer pour l’emploi » qui finance directement les propriétaires privés, à hauteur de 100 millions d’euros par an de subventions, soit 500 millions sur 5 ans ;
  • Cofinancement de 40.000 logements pour les jeunes : Action Logement s’engage à cofinancer avec l’Etat 40.000 logements dédiés aux jeunes sur les cinq prochaines années, dont 20.000 logements destinés à des jeunes actifs et des jeunes travailleurs. Cette action s’inscrit dans l’objectif global du gouvernement de créer sur le quinquennat 80.000 logements pour les jeunes, dont 60.000 en faveur des étudiants et 20.000 en faveur des jeunes actifs. Le protocole confirme que la caution locative Visale sera pérennisée et élargie. Il est également prévu qu’Action Logement rendra le futur « bail mobilité professionnelle » éligible au dispositif Visale.

Enfin, un projet de loi devait être déposé avant la fin 2017 d’après le site du gouvernement. Il est aujourd’hui attendu pour mars 2018.

  • Ce projet de loi a finalement été déposé le 4 avril 2018 pour une Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN). Voir la fiche dédiée.

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